Les forêts répondent à des préoccupations stratégiques pour la société, tant sur le plan environnemental, qu'économique et sociétal. Elles représentent aussi un baromètre du changement climatique, spectaculaire en forêt entre crises sanitaires, tempêtes et incendies. À la fois salvatrices et victimes, elles sont désormais sous le feu des projecteurs. Forêts de France consacre son dossier de janvier-février 2024, à la médiatisation des forêts et à la manière dont les acteurs de la filière peuvent s’emparer de cette opportunité, afin que cet univers parfois fantasmé soit mieux connu et reconnu.
Si c’est une bonne chose que les médias parlent désormais quotidiennement de la forêt, pour les forestiers, qui ne sont pas tous portés vers la communication, cet engouement nouveau s’avère parfois frustrant et déstabilisant. Or, au cœur des imaginaires collectifs, la forêt nourrit des attentes particulières chez les citoyens, liées parfois à une méconnaissance du monde forestier et de la filière forêt-bois. La médiatisation grandissante de la forêt appelle donc les forestiers à sortir de leur silence et à s’emparer de cette opportunité pour casser les préjugés et sensibiliser le grand public à leurs métiers.
La forêt au cœur d’un imaginaire collectif
Les forêts occupent une place prépondérante dans les imaginaires collectifs. Omniprésente dans les films, les publicités, les jeux ou les livres, la forêt est aussi un lieu de balade pour les Français, 90 % d’entre eux s’y rendant au moins une fois par an d’après l’ONF. Et si la forêt intrigue, c’est qu’elle est un miroir de la civilisation, qui, comme elle, évolue. Autrefois lieu fermé et inquiétant, elle est aujourd’hui un refuge qui permet d’échapper aux trop-pleins contemporains : surdose de technologie, de béton, de bruit, manque de sens et d’oxygène.
Actuellement, l’urgence climatique fait prendre pleinement conscience du rôle crucial joué par les forêts pour le maintien des équilibres planétaires, mais également de leur fragilité. Puits de carbone et grand réservoir de biodiversité terrestre, les forêts sont aussi les premières victimes du changement climatique qui influe durablement sur le fonctionnement des écosystèmes forestiers. En écho à l’urgence environnementale mondiale, la forêt n’est donc plus seulement une toile de fond ; l’arbre acquiert une nouvelle valeur symbolique. Aujourd’hui, le vivant s’individualise et l’on s’attache à l’arbre comme à un ami.
Une opportunité de communication à saisir
La gestion forestière constitue historiquement un métier de l’ombre, et les forestiers seraient par nature adeptes du silence. Mais à l’heure où la forêt est sous le feu des projecteurs, cette faible présence dans le débat public expose à des risques médiatiques. À rester silencieux, les forestiers prennent en effet le risque d’être pointés du doigt par le reste de la société. Et l’on voit d’ailleurs apparaître de nombreuses incompréhensions ou préjugés sur les acteurs de la filière forêt-bois.
Dans ce contexte, certains cherchent à dépasser ces clivages. Le projet de recherche interdisciplinaire belge « Appel de la forêt » s’attarde ainsi sur les attentes des citoyens, afin de mieux les comprendre et ainsi d’identifier les sources d’incompréhension et les points de convergence entre forestiers et non-forestiers. En France, l’interprofession France Bois Forêt mise quant à elle sur la pédagogie pour rassurer l’opinion sur des sujets tels que la déforestation dans l’Hexagone.
Le défi de la communication permet d’accélérer le partage de connaissance. Prendre la parole, c’est jouer le rôle d’ambassadeur.
Marie Lemaire et Blandine Even (Forêts de France)