Les arbres fourragers, des alliés face aux sécheresses

Arbres fourragers
Extrait de la couverture du livre Arbres fourragers (crédit photo: Jérôme Goust))
Les arbres fourragers, des alliés face aux sécheresses

S’ils ont connu un déclin, les arbres fourragers pourraient contribuer à l’adaptation de l’agriculture aux sécheresses, entre autres fonctions environnementales. C’est ce que propose un récent ouvrage.

 

Et si l’agriculture remettait au goût du jour les arbres fourragers, dans l’optique de mieux s’adapter aux sécheresses, voire de « cultiver » la biodiversité ? C’est ce que propose Jérôme Goust, dans son récent ouvrage Arbres fourragers. De l’élevage paysan au respect de l’environnement.

Ancien agriculteur biologique et partie prenante du réseau Nature & Progrès, l’auteur ne cache son orientation écologiste. Ce livre tient surtout du guide pratique et de vulgarisation.

L’utilisation du feuillage pour nourrir le bétail consiste en une pratique ancienne qui intéresse aujourd’hui des chercheurs de l’INRA. Les feuilles de châtaignier, noisetier, alisier, cormier ou d’érable sycomore, les aiguilles et bourgeons de pins (sylvestre, noir, maritime), peuvent devenir un mets de choix pour vaches, chèvres ou brebis. Lorsque l’essence est mellifère, à l’instar du robinier faux-acacia, elle offre, du même coup, du nectar aux abeilles.

Quant aux branches, une fois pâturées, dépouillées de leur feuillage, elles donnent matière à du bois de chauffage, à du broyat pour apport au sol (bois raméal fragmenté ou BRF), voire à la fabrication d’outils.

Les arbres prennent la relève de l’herbe

Pour les éleveurs, les arbres permettent de limiter le surpâturage ou l’achat de fourrage, plaide Jérôme Goust. Car ils prennent la relève de l’herbe lorsque celle-ci se fait rare, avant sa repousse de fin d’été, tout en puisant l’eau plus en profondeur que ne le font les herbages. Sans compter le rôle écologique des arbres, dans la limitation de l’érosion, la régulation du cycle de l’eau, l’hébergement d’oiseaux ou d’insectes, l’apport d’ombrage. Les arbres fourragers sont aussi l’occasion de favoriser le bien-être animal et de maintenir une activité dans des zones défavorisées.

En pratique, les feuilles, ainsi que les jeunes rameaux voire les fruits des arbres, peuvent se pâturer sur pied, selon une méthode proche du sylvopastoralisme. Ou alors les branches sont coupées en vue de disposer les rames fourragères au sol. Ce qui laisse place aux trognes ou arbres têtards (après étêtage) ou aux arbres émondés (avec suppression des branches latérales).

Arbres fourragers, pas toujours aimés de la foresterie
À l’apparition de l’élevage, le bétail s’alimentait en partie dans les espaces boisés. Utilisés depuis le Néolithique et jusqu’au milieu du XXe siècle pour le fourrage d’appoint, les arbres furent peu à peu devancés par le développement des prairies. Au XVIIe siècle, la forêt se voit confirmer dans le rôle de pourvoyeuse de bois d’œuvre, pour les navires en particulier. C’est l’époque de Colbert en France et la même tendance s’observe en Grande-Bretagne. Mal-aimé de la foresterie, l’émondage des arbres commence à être pointé du doigt, à la fin du XVIIIe siècle, comme une pratique qui nuit à la production de bois, souligne Jérôme Goust. Des voix se sont même élevées pour demander la condamnation de ceux qui étêtent les chênes. La mécanisation de la fauche de l’herbe, l’exode rural ou encore le remembrement agricole et le recul des haies, ont par la suite sonné le déclin des arbres fourragers. Ceux-ci pourraient se vêtir aujourd’hui d’une meilleure reconnaissance de leurs services écosystémiques.

Une nouvelle vocation pour les taillis à courte rotation ?

L’auteur fait état du programme de recherche Oasys mené par l’INRA à Lusignan, dans la Vienne (Nouvelle-Aquitaine). Une expérimentation y porte sur un système bovin laitier dans des parcelles d’agroforesterie. L’institut a constitué un « trognoscope », soit un arboretum de 50 espèces ligneuses susceptibles d’être conduites en trognes.

L’ouvrage Arbres fourragers donne des indications sur la valeur nutritive de plusieurs essences, tirées de la bibliographie, d’analyses en laboratoire ou effectuées par l’INRA. Il présente un panel d’arbres fourragers, ainsi que plusieurs types de taille et des retours d’expérience, et souligne la nécessaire éducation alimentaire des animaux. Il invite à réfléchir sur des taillis à courte ou très courte rotation (TCR et TTCR) qui pourraient produire du fourrage en plus du bois-énergie.

Chrystelle Carroy/Forestopic

Pour aller plus loin :
Arbres fourragers. De l’élevage paysan au respect de l’environnement, Jérôme Goust, Éditions de Terran, 2017, 221 p., 19 euros.

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