Depuis la mobilisation et la valorisation des bois touchés par les scolytes jusqu’au renouvellement des forêts atteintes, une charte interprofessionnelle prévoit des actions coordonnées dans le Grand Est et en Bourgogne-Franche-Comté.
La crise des scolytes ne faiblit pas dans le nord-est de la France. Le bois d’épicéa touché par le coléoptère en 2018 et début 2019 dépasse 1,1 million de m3 dans le Grand Est et en Bourgogne-Franche-Comté, d’après les estimations des professionnels. De quoi provoquer un afflux de bois prévisible sur le marché.
Des dégâts à 80 millions d’euros
Ces dégâts se chiffreraient à plus de 80 millions d’euros, du fait des coupes sanitaires et des récoltes à effectuer, de la perte de valeur des bois ou encore des forêts à renouveler.
Face à cette situation, un plan de gestion coordonnée est en cours de signature, sous la houlette des interprofessions régionales Fibois Grand Est et Fibois Bourgogne-Franche-Comté. Il vise à associer les propriétaires forestiers publics et privés, les coopératives et les experts forestiers, les entrepreneurs de travaux forestiers, les industriels de la filière bois ou encore les pépiniéristes.
Sous la forme d’une charte, ce plan interrégional prévoit un chapelet d’actions, dont le suivi des attaques de scolytes (notamment avec un outil de l’IGN), la récolte rapide des arbres malades, la priorité donnée aux arbres scolytés lors des achats de bois, la promotion de ces bois bleuis par les attaques d’insectes mais ayant conservé leurs qualités mécaniques, le renouvellement des forêts. Les deux interprofessions centralisent le suivi de la commercialisation des bois infestés, à partir des données que s’engagent à fournir propriétaires, gestionnaires, exploitants forestiers et scieurs.
Le Syndicat des exploitants de la filière bois (SEFB) Grand Est indique qu’il refuse de signer cette charte, tant qu’il ne lui est pas permis de siéger au conseil d’administration de Fibois Grand Est.
Des débouchés locaux et dans d’autres régions
Sur le terrain, la récolte avance plus vite pour les bois de gros diamètre (bois d’œuvre…) que pour les autres. Lucie Richert, chargée de missions forêt et première transformation à Fibois Grand Est, explique :
« La mobilisation des bois scolytés paraît plus difficile dans les petites forêts privées qui ne sont pas accompagnées par des gestionnaires. Il en est de même pour les bois de petit diamètre ou de qualité emballage qui ne trouvent pas de débouché au niveau local. Mais, la région Nouvelle-Aquitaine est demandeuse, et la Bretagne également. »
Des aides au transport, qui seraient pourvues par l’État, restent à l’étude. Que les grumes prennent le train est une piste évoquée.
Les régions ont pris les devants. Celle du Grand Est a opté pour des aides dédiées. En Bourgogne-Franche-Comté, l’assemblée régionale a notamment mis en place un total de 2,5 millions d’euros d’avances remboursables, disponibles jusqu’à fin juin 2021, et destinées aux PME ; ce dispositif vise à aider les scieries à acheter des bois contaminés, puis à les stocker.
Des réflexions pour de nouvelles essences
Quelles forêts succéderont aux épicéas décimés ? Des réflexions en cours intègrent l’adaptation au changement climatique, sans perdre de vue les besoins des industriels. Elles s’orientent vers trois directions :
– les mélanges d’essences ;
– de nouvelles répartitions géographiques des espèces d’arbres ;
– l’implantation de nouvelles essences (cèdre, robinier...).
Des insectes ravageurs colonisent aussi les sapins pectinés dans l’est de l’Hexagone, signale le département de la Santé des forêts (DSF). Ce phénomène, dû aux scolytes du sapin et aux pissodes, concerne en particulier les arbres affaiblis par le stress hydrique de 2018.
C. C./Forestopic
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