Le « zéro phyto » entre en vigueur en 2017. Quoique peu utilisés en forêt, les herbicides laissent peu à peu la place à des techniques mécanisées dans les massifs gérés par l’Office national des forêts.
L’objectif « zéro phyto » vaut aussi pour les forêts publiques. L’Office national des forêts (ONF) s’y prépare avec des techniques mécanisées, en substitut aux herbicides.
À compter de 2017, il est interdit à l’État, aux collectivités locales et aux établissements publics, d’utiliser des produits phytosanitaires pour l’entretien des espaces verts, des forêts, des voiries et des promenades, accessibles ou ouverts au public. C’est une disposition inscrite dans le Code rural et de la pêche maritime (article L253-7).
La nouvelle législation ne se limite pas aux herbicides. Elle englobe tous les produits phytopharmaceutiques, à l’exception du biocontrôle, des produits autorisés en agriculture biologique, des substances dites « à faible risque », et de ce qui relève de la lutte contre les organismes nuisibles. À l’égard des insectes ravageurs, le biocontrôle est en test, par exemple contre la processionnaire du chêne.
L’épandage d’herbicides, une méthode en sursis
L’usage des herbicides en forêt est considéré comme anecdotique, en termes quantitatifs. Claudine Richter, du département recherche, développement, innovation, à l’ONF, précise :
« Les herbicides s’utilisent traditionnellement avant la plantation, afin qu’il n’y ait plus de végétation concurrente au moment où l’on installe les plants. Nous y avions recours dans les forêts publiques de manière raisonnée et restreinte. Ce type de méthodes est en sursis. Avec le “zéro phyto”, il nous faut innover. »
La molinie, la fougère, des graminées en contexte sec, comptent parmi les principaux rivaux des plants forestiers. Ces végétations peuvent entrer en compétition avec les jeunes arbres pour l’accès à l’eau et à la lumière, et le développement racinaire.
Mini-pelle et scarificateur réversible
Depuis 5 ans, l’ONF travaille sur des techniques mécanisées pour contrer la concurrence herbacée dans les forêts de plantation et celles en régénération naturelle. Il le fait en partenariat avec l’INRA-Nancy, avec la participation du Centre national de la propriété forestière (CNPF) ainsi que des centres régionaux (CRPF), et l’Institut pour le développement forestier. Ceci de concert avec des constructeurs d’engins et outils.
Claudine Richter en décrit le principe :
« Ces techniques s’appuient sur une mini-pelle, un engin plutôt mobile et léger, de 3 à 5 tonnes, monté sur chenille, et sur lequel viennent s’adapter divers outils. »
Maniable et compacte, la mini-pelle est conçue pour se frayer un chemin dans les situations d’encombrement ou dans les terrains en pente (allant jusqu’à 30 °). Par exemple, elle s’associe avec un râteau scarificateur réversible (breveté par Becker) qui extrait du sol les racines des fougères. Par comparaison avec la fougère, la molinie donne plus de fil à retordre, explique Claudine Richter :
« La molinie se trouve sur des sols présentant des contraintes d’hydromorphie. Le scarificateur prélèverait alors des paquets de terre avec des risques de bourrage dans le râteau. »
Transfert technologique, évaluation coût-efficacité
Les essais portent sur cinq sites expérimentaux et, à une échelle plus large, sur une dizaine de placettes pilotes, en tout 70 à 80 ha. Le transfert technologique a commencé concernant la fougère, par le biais de formations ou de visites de terrain. L’INRA met à disposition des fiches sur la mini-pelle et le scarificateur réversible, et d’autres outils tels que pioche-herse ou sous-soleur.
Le projet s’appuie notamment sur des financements du ministère chargé de la forêt, et de France Bois Forêt.
Le coût de ces outils paraît a priori plus élevé que celui des herbicides au moment de l’installation. Mais, leur efficacité pourrait faire baisser les coûts sur le long terme, grâce à des dégagements moins nombreux, tels que les bâtonnages pratiqués sur la fougère. Là aussi, Grenier Franco vient de développer un bâtonneur mécanisé pour les forêts en régénération naturelle.
L’évaluation se poursuit, en termes de performance technique et de productivité, et sur la façon dont les plants et leur système racinaire se développent, et de même pour la végétation concurrente. Un autre projet vise à étudier l’effet de telles opérations mécaniques sur le carbone du sol.
Chrystelle Carroy/Forestopic
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