Évoqué dans le programme national forêt-bois, un rapprochement des organisations professionnelles de la filière pourrait passer par l’invention de nouveaux modes de financement.
Stéphane Travert, ministre de l’Agriculture, serait sur le point de confier à Jean-Yves Caullet une mission sur un rapprochement des organisations professionnelles France Bois Forêt (FBF) et France Bois Industries Entreprises (FBIE), selon nos informations.
Jean-Yves Caullet, président de l’Office national des forêts (ONF), a déjà rempli des offices de médiateur. Élu local en tant que maire d’Avallon, plusieurs fois député dans l’Yonne, il a conduit une mission qui a abouti à la création, fin 2016, d’une section « pin maritime » au sein de FBF. Ce qui formalisa l’entrée de cette essence dans le dispositif de la contribution volontaire obligatoire (CVO). À ce titre, Jean-Yves Caullet a mené plusieurs mois de discussions. Il en est ressorti la définition d’une gouvernance et de modes de financement.
Jean-Yves Caullet est notamment l’auteur d’un rapport sur la filière forêt-bois, remis au Premier ministre en 2013, et venant en prélude à la loi d’avenir sur l’agriculture de 2014. Il s’y exprime sur la gouvernance des organisations professionnelles ; il identifie alors le Conseil supérieur de la forêt et du bois comme « le lieu le plus synthétique de la filière dans sa diversité, mais son rôle reste très embryonnaire par rapport à un objectif de “pilotage” d’une politique de filière ».
Un rapprochement FBF-FBIE voulu par l’État
La mis en place d’un outil institutionnel unique pour la filière forêt-bois, permettant « un travail collaboratif structuré », fait partie des objectifs du programme national de la forêt et du bois 2016-2026 (PNFB). On peut lire dans cette feuille de route :
« L’État enjoint les organismes qui constituent aujourd’hui les piliers de la structuration de la filière d’engager des travaux pour se rapprocher, sous la forme qu’ils définiront, en réunissant l’ensemble des acteurs de la filière, depuis la production forestière jusqu’au produit fini à base de bois. »
La Cour des comptes a, en 2014, recommandé sans ambages de fusionner FBF, FBIE et le comité professionnel Codifab. Néanmoins, comme le souligne le CGAAER* dans un rapport de 2015 :
« Les tutelles ne peuvent rien imposer si les acteurs ne se décident pas. »
D’autant qu’à la pluralité des entités professionnelles, s’ajoute la pluralité des ministres compétents. La filière forêt-bois ne relève pas du seul ministère de l’Agriculture, même si c’est ce dernier qui pilote le PNFB.
CVO versus taxe affectée
La mission, telle qu’envisagée, doit se plonger dans les différences de financement qui existent entre FBF et FBIE.
France Bois Forêt, interprofession reconnue par un arrêté du 27 mai 2005, perçoit la CVO auprès des producteurs de graines et plants forestiers, des propriétaires forestiers lorsqu’ils vendent du bois, des entreprises d’exploitation ou de travaux forestiers, ou encore des scieries.
En parallèle, « le Codifab entretient des relations étroites avec France Bois Industries Entreprises », note le CGAAER. Le Codifab gère une taxe affectée dont s’acquittent fabricants et importateurs des industries du bois.
La CVO, autant que la taxe affectée, visent à financer des actions d’intérêt collectif. France Bois Forêt s’appuie sur un budget annuel de plus de 8 millions d’euros. Le Codifab a collecté 14 millions d’euros en 2016, provenant à 72,5 % de l’ameublement.
L’éclairage d’autres filières
L’invention de nouvelles voies de financement aurait à questionner la place de différents produits au sein de la filière bois. Cela vaut par exemple pour les meubles dont seuls les pieds sont en bois, quand d’autres matériaux dominent, comme des mousses ou du métal. Les travaux qui s’annoncent donnent l’occasion de chercher des éclairages auprès d’autres filières.
Face à cette complexité, la mission va sans doute donner lieu à un compte rendu, voire à un rapport. Reste aussi à définir, dans un tel paysage, quelle est la place de France Bois Régions, avec son réseau d’interprofessions régionales.
De leur côté, les présidents de FBF et FBIE, respectivement Cyril Le Picard et Dominique Weber, affichent une démarche commune sur le plan politique, notamment lors de récentes rencontres avec le ministre Stéphane Travert, ainsi qu’à l’Elysée et à Matignon. La mise en place d’une « veille économique mutualisée » est un autre projet porté par les deux structures, associées au Codifab.
Chrystelle Carroy/Forestopic
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* CGAAER : Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux.