La maison de couture Chanel a créé un décor de forêt pour y présenter sa dernière collection. L’évènement ravive le débat sur les relations entre forêt et société, entre autres.
La forêt est tendance ! Au point que le grand couturier Karl Lagerfeld a transformé le Grand Palais, à Paris, en une forêt reconstituée pour y présenter, le 6 mars 2018, sa collection automne-hiver 2018-2019.
Tout y est, rapporte Vogue. Neuf arbres provenant du parc naturel régional du Perche viennent planter le décor, selon le magazine. Au sol, de la mousse côtoie de la terre mouillée. Et l’assistance a droit à des bancs en bois de peuplier. Avec, en fond de décor, des images de forêt en trompe-l’œil.
The #CHANELFallWinter 2018/19 Ready-to-Wear show. #PFW
— CHANEL (@CHANEL) 7 mars 2018
The full cut on https://t.co/Hwro2eFNjl pic.twitter.com/QjdMwsojvq
Karl Lagerfeld raconte dans une vidéo institutionnelle (en anglais) :
« J’aime la forêt, je trouve que c’est très beau. Dans un sens, cela me rappelle mon enfance. Car la maison où j’ai passé 8 ans de mon enfance – je l’ai quittée à l’âge de 14 ou 15 ans –, était au centre d’une forêt […]. C’est mon goût, mon esprit véritable, et en même temps celui de Chanel. »
La revue Elle y voit une « forêt enchantée » dans un article du 6 mars. Elle est plutôt « désenchantée », selon France Nature Environnement (FNE). La fédération d’associations s’émeut de ce que la maison de couture abatte des arbres « pour quelques heures de défilé » – une position abondamment relayée par la presse. FNE estime qu’il « eût été préférable, et autrement innovant, de choisir d’installer le défilé directement en forêt ».
D’où viennent et que deviennent les arbres de Chanel ?
Joint par Forestopic, Chanel apporte les précisions suivantes :
« Contrairement à ce qui a été affirmé, nous n’avons pas utilisé de chênes centenaires, mais de jeunes chênes et peupliers en provenance d’une forêt française du Perche. Ces arbres ont été acquis dans le cadre d’un plan d’entretien et de coupe inscrit dans un plan simple de gestion (PSG) d’une forêt privée, qui garantit la gestion durable de la forêt. Bien avant que la polémique naisse, nous nous sommes engagés à replanter une parcelle de 100 nouveaux chênes au sein de la forêt.
« À l’issue du défilé, ces arbres ont été réintroduits dans le circuit traditionnel de valorisation du bois naturel. Les troncs des chênes seront repris par une scierie pour en faire des planches, leurs branches seront transformées en copeaux puis recyclées en compost. Les bancs composés de pieds et d’assises sont retournés dans une scierie et destinés à faire en partie de la plaquette pour chaufferie et aussi à la transformation en bois d’emballage et de calage. Tout ceci avait été contracté en amont de notre défilé, Chanel s’attachant toujours au recyclage de ces décors. »
Le débat se poursuit sur les réseaux sociaux. Parfois sur le mode de l’ironie, pour signifier que le bois peut être une belle carte à jouer, plutôt que des matériaux non renouvelables comme le béton ou le plastique.
C'est sûr que 9 arbres en plastique de 15-20 m auraient été tellement mieux. Plus écologiques, non-polluants, recyclables... @KarlLagerfeld pense au béton sinon ! #VendrediLecture #Chanel #ChacunSonCombat
— HELOU Tammouz Eñaut (@T_E_Helou) 9 mars 2018
Que des arbres soient coupés en #forêt n'a rien de choquant en soi. C'est nécessaire pour la construction, l'industrie de transformation etc. La question est de savoir si cet abattage est un pur caprice de mode ou si ces arbres ont été récupérés par la suite
— Kreastwood SAS (@KrEast_Wood) 12 mars 2018
Des internautes se demandent si la forêt dont sont issus les arbres est régie selon une gestion durable, ou si les arbres coupés ont vocation à servir ensuite pour une construction bois. Ou encore si un défilé en forêt peut être compatible avec la préservation des sols forestiers.
Chrystelle Carroy/Forestopic
• Sur le même sujet, dans notre rubrique humoristique et satirique Grivoiseries : Défilé forestier de Chanel: à qui profitent les cimes et le glamour ?
Mis à jour le 13 mars 2018