Les forestiers misent entre autres sur la plantation, par parcelles entières ou par petites touches (enrichissements), pour renouveler la forêt, de manière adaptée aux climats futurs. On estime que, sur les dix prochaines années, environ 1,5 million d’hectares devront faire l’objet d’une intervention de renouvellement. Les chercheurs, les semenciers et les pépiniéristes, s’organisent pour assurer la disponibilité et l’adéquation des jeunes plants forestiers.
La génétique forestière en France concerne l’étude des arbres et des peuplements forestiers du point de vue de leur héritabilité génétique. Cette discipline joue un rôle essentiel dans la gestion durable des forêts et dans l’adaptation des peuplements forestiers aux changements climatiques. Les ressources génétiques forestières n’étant pas figées, leur diversité est en évolution permanente sous l’effet combiné des processus écologiques naturels, des interventions humaines et, à une échelle plus large, des effets de l’aménagement du territoire.
Près d’un siècle de travaux sur la génétique forestière
Dans les années 1930, les premiers travaux sur la génétique des populations d’arbres commencent à apparaître, bien que l’accent soit principalement mis sur les aspects morphologiques (formes, tailles) plutôt que génétiques. Après la Seconde Guerre mondiale, avec l’essor des techniques de recherche scientifique, des études sur la variabilité génétique des forêts commencent à se développer, principalement en lien avec la sélection d’espèces pour des objectifs économiques, comme l’amélioration de la production de bois.
Dans les années 1960-1970, la notion de sélection génétique pour améliorer les peuplements forestiers se développe. Des programmes de sélection génétique et d’amélioration des espèces comme le pin maritime et le chêne voient le jour.
Dans les années 1980-2000, la génétique forestière se spécialise de plus en plus, grâce à des avancées dans les technologies de biologie moléculaire. Des techniques comme les marqueurs génétiques commencent à être utilisées pour étudier la diversité génétique des populations d’arbres de manière plus précise. Les programmes de conservation génétique et de gestion durable des forêts prennent de l’ampleur. La sélection génétique devient un outil important pour améliorer la résilience des forêts face aux maladies et aux changements climatiques.
À partir des années 2000, les préoccupations environnementales et le changement climatique prennent une place croissante dans la gestion forestière. Les forêts doivent être capables de s’adapter à des conditions climatiques changeantes, et la génétique forestière joue un rôle essentiel dans cette adaptation. Des recherches en génomique, biotechnologies et séquençage génétique se développent, permettant de mieux comprendre les mécanismes de la résistance aux maladies, de la croissance des arbres et de leur adaptation aux nouveaux environnements.
La France, leader européen de la recherche en génétique forestière
Bruno Fady, directeur de recherches à l’Inrae, revient sur la coopération à l’échelle européenne en matière de génétique forestière. L’Inrae pilote de nombreux travaux de recherche sur la génétique de l’adaptation, que ce soit celle de la régénération naturelle ou celle des matériels forestiers de reproduction (MFR), explique-t-il :
« Il y a un très bon niveau de collaboration, avec de nombreux échanges de bonnes pratiques, de données scientifiques et d’analyses en commun. L’Inrae participe en ce moment à deux projets européens d’intérêt. Le projet Forgenius étudie la diversité des forêts européennes, leur conservation et leur résistance au changement climatique. L’un des objectifs est d’améliorer le système européen d’information sur les ressources génétiques forestières en y intégrant de la modélisation. Le programme Euforgen, qui gère ces ressources génétiques, est d’ailleurs le plus avancé au monde. Ensuite, le projet Optforests teste dans différentes régions climatiques européennes des essences peu utilisées en forêt, et pour lesquelles nous disposons de peu de données génétiques : le chêne pubescent, le frêne, le tilleul à petites feuilles, l’érable sycomore… L’une des ambitions de ce projet est d’établir un réseau européen de pépinières forestières s’entraidant pour fournir et déployer un matériel adapté, résilient et diversifié dans un contexte lié au changement climatique. »
Outre une introduction complète aux enjeux de la génétique forestière aujourd’hui, le dossier de mars 2025 de Forêts de France présente les chiffres clés du renouvellement et la juste place de la plantation, des interviews de scientifiques sur le visage de la forêt de demain, une rencontre avec les deux semenciers français et le point de vue de pépiniéristes sur les chantiers de plantation à engager.
Violaine Grimprel (Forêts de France)