La forêt et le bois pour «décarboner» le plan de relance de la France, voire de l’Europe

Le taux d’activité de la filière bois continue à remonter fin avril 2020
Le taux d’activité de la filière bois continue à remonter fin avril 2020 (crédit photo: Uffep)
La forêt et le bois pour «décarboner» le plan de relance de la France, voire de l’Europe

Le chef de l’État Emmanuel Macron appelle à une nouvelle stratégie sous le signe de la sobriété carbone. Le CSF bois met sur la table des idées pour relancer l’activité en France et en Europe.

 

« Il nous faudra bâtir une stratégie où nous retrouverons le temps long, la possibilité de planifier la sobriété carbone, la prévention, la résilience qui seules peuvent permettre de faire face aux crises à venir. »

Cette déclaration est du président de la République, Emmanuel Macron, lors de son adresse à la nation du 13 avril 2020. Quelques jours plus tard, le comité stratégique de filière CSF bois finalisait ses propositions pour redémarrer l’économie.

La première priorité du CSF bois est de dépasser le paroxysme de la crise sanitaire du coronavirus Covid-19, notamment en assurant la survie des acteurs économiques. La seconde s’inscrit dans une relance créatrice d’emplois, sous le signe de la transition écologique.

  1. La reprise du secteur de la construction…

La reprise du secteur du BTP reste attendue. « Pour la seule filière bois, 50 % de la valeur ajoutée et des emplois dépendent du marché final de la construction », souligne le CSF.

« L’État doit renforcer la mise en responsabilité directe des maîtres d’ouvrages publics et privés, et des grands donneurs d’ordre, dans la production rapide des ordres de service de réouverture des chantiers du bâtiment », lance le CSF, comme l’a fait avant lui l’Union des industriels de la construction bois (UICB).

Cela peut aussi passer par un raccourcissement ponctuel des délais dans les demandes de permis de construire ou un allongement des durées de réalisation des chantier.

De nouveaux délais pour la construction et l’urbanisme
Une ordonnance du 15 avril 2020 en corrige deux autres du 25 mars. Notamment, elle suspend certaines procédures, en matière de permis de construire, de délai d’instruction dans l’urbanisme.
Le ministère de la Cohésion du territoire s’explique dans un communiqué : « L’ordonnance du 25 mars avait pour effet de retarder tous les projets de construction de 3 mois après la période d’urgence sanitaire. Mais plus encore, dans le domaine de la construction, l’ensemble du processus (financements, actes notariés, chantiers) se trouve bloqué tant que les délais de recours contre l’autorisation de construire ne sont pas purgés. L’ordonnance [du 15 avril] prévoit ainsi que les délais de recours ne seront plus prorogés comme prévu par l’ordonnance du 25 mars mais suspendus. La période de suspension est par ailleurs réduite d’un mois. »
La durée de suspension ramenée à un mois concerne aussi les délais d’instruction des autorisations d’urbanisme. De plus, l’ordonnance réaménage les délais des enquêtes publiques.

  1. … et aussi du négoce, de la distribution, de la logistique

Le CSF appelle l’État à faciliter le redémarrage de l’industrie, du négoce, de la distribution, de la logistique. Par exemple, les enseignes de bricolage pourraient s’inspirer des mesures sanitaires prises dans la grande distribution, comme la limitation du nombre de clients circulant dans un lieu de vente. C’est par ailleurs l’une des préconisations du guide sur le Covid-19 publié par la Fédération du négoce de bois et des matériaux de construction avec des syndicats de personnels.

Les entreprises anticipent déjà la réouverture des espaces de ventes en produisant plus que la demande, indique la Fédération nationale du bois (FNB). D’après son baromètre hebdomadaire, l’activité de la filière bois se situe, en moyenne, à 67 % du niveau habituel, soit une progression de dix points entre la mi-avril et la fin avril 2020.

  1. La période estivale pour rattraper l’activité

La période allant de juillet à septembre 2020 peut être mise à profit pour rattraper les retards pris dans les chantiers de construction. Idem parmi les industriels de la transformation du bois, pour qui le mois d’août connaît d’ordinaire un taux d’activité d’environ 20 %. Cette perspective peut s’accompagner de mesures pour adapter les congés.

  1. Soutien aux entreprises et aux particuliers

Au sein des entreprises, les difficultés de trésorerie pourraient durer jusqu’en février 2021, au moins. Aussi, la filière bois demande par exemple un étalement du paiement des charges sociales et fiscales liées à l’état d’urgence sanitaire, ou une défiscalisation des heures supplémentaires.

À l’intention des particuliers, l’accompagnement peut passer notamment par un maintien des financements aidés pour les projets bas carbone dans l’immobilier, l’agencement ou l’ameublement des logements.

  1. Des mesures pour la filière forêt-bois

Les CSF plaide pour des mesures spécifiques à la forêt et au bois :
– un élargissement des aides fiscales dédiées aux travaux forestiers (« DEFI » forêt) et des financements pour l’amélioration des peuplements forestiers et des dessertes forestières ;
– un soutien sur 6 mois à l’export des sciages valorisant des bois d’épicéa et de sapin touchés par les scolytes, afin de financer les surcoûts de la récolte des bois et de leur transport vers les ports d’expédition. Un « plan scolytes » est déjà en cours pour l’épicéa ;
– un report, par l’Office national des forêts, des échéances de paiement liées aux ventes de bois sur pied ;
– la reconnaissance, dans le cadre des marchés publics, de l’intérêt environnemental du papier issu de la gestion durable des forêts, au même titre que le papier recyclé ;
– le soutien à la production française, la limitation des importations extra-européennes pour les produits que l’Europe est en mesure de produire de manière auto-suffisante.

  1. Une relance bas carbone

• La France aura-t-elle un plan de relance bas carbone ? Les professionnels de la forêt et du bois l’appellent de leurs vœux :
– pour le bâtiment, mettre en avant des objectifs à la faveur de la nouvelle réglementation environnementale 2020 (RE2020) ;
– pour le bois énergie, relancer les soutiens à la cogénération bois (en partie mis de côté par les pouvoirs publics), en misant sur des rendements énergétiques de 75 % au minimum et sur une « complémentarité des usages » du bois ;
– promouvoir le Made in France et le bois issus de forêts françaises.

• Des propositions de mesures entrent dans le cadre du « pacte vert » (Green Deal) de la Commission européenne :
– défendre une « stratégie forestière européenne forte, tendue vers la reforestation et la mobilisation du bois » ;
– durcir le contrôle des bois illégaux entrant dans l’Union européenne, dans le cadre du règlement européen RBUE ;
– affecter des recettes de quotas carbone européens à l’investissement forestier.

C. C./Forestopic

Reproduction interdite sans autorisation écrite préalable.